Paix aux souffrants !
Paix ! Paix ! paix aux damnés ! paix aux esprits meurtris,
Paix à tous les souffrants dont j'entends tous les cris,
A mes frères humains, à mes frères les bêtes,
Dont chacun en sa barque endure cent tempêtes !
Paix aux muets souffrants, à toi noble clochard
Dont le passant aisé détourne le regard...
Je suis toi, me sens-tu ? J'éprouve ta misère,
Mais je m'avoue heureux, dans notre long calvaire,
D'être ton compagnon souffrant et indigent
Loin de tous les crésus possédés par l'argent !
Paix à vous, fronts ridés ! Vous dont l'état sénile
Est vu comme une tare en cette époque hostile...
Je sais que vous souffrez... mais quand vous gémissez
L'on vous jette un « remède » ou des mots courroucés...
L'on ne sait plus, hélas ! que par votre présence,
Par votre âge avancé et votre expérience,
Vous êtes des flambeaux au milieu des humains,
Des astres argentés indiquant les chemins...
Mais cette époque aveugle, en sa sottise immonde,
Souhaite en secret que vous quittiez le monde...
L'on vous voit comme « un poids » dans la société...
« Vous ne fécondez plus la productivité,
Et vous coûtez trop cher à la caisse publique »,
Se dit en murmurant l'engeance diabolique
Qui s'engraisse à sa guise et voudrait votre mort
Pour voler davantage et gonfler son trésor...
Que la paix soit sur vous, vieillards dans la misère,
Isolés, oubliés, oppressés ou à terre !
Paix à tous les souffrants et paix aux miséreux,
Et paix à tous ceux qui, en ces jours ténébreux,
Apportent par un mot ou quelque grand effort
Aux êtres tourmentés un peu de réconfort !