Les dispositifs militaires et diplomatiques se mettent en place alors que la reprise des combats est attendue dans les prochaines semaines.
Préparatifs militaires
La Grande-Bretagne confirme l’envoi de renforts alors que le Danemark et l’Australie pourraient également augmenter leurs contingents. De leur côté, les taliban affirment disposer de 6 000 combattants et de nombreux volontaires de la mort.
Londres se désengage du bourbier irakien et se redéploie en Afghanistan. « Nous avons décidé qu'il était opportun pour le Royaume-Uni de fournir des troupes supplémentaires pour la région du sud » de l'Afghanistan, a indiqué le ministre britannique de la Défense, M. Des Browne, dans un communiqué publié vendredi soir. « Nous sommes parfaitement conscients que nos forces militaires, particulièrement l'Armée de terre, continuent d'opérer à un rythme opérationnel élevé, mais nous pensons qu'un engagement supplémentaire est gérable », a ajouté le ministre.
Lundi, devant la Chambre des Communes, il a annoncé l’envoi de près de 1 400 soldats supplémentaires (provenant de régiments d’infanterie, d’artillerie et de blindés légers) en Afghanistan, ce qui porte à 7 700 la contribution britannique à la lutte contre les taliban. Londres fournira au commandement sud de l’Isaf, la Force internationale d’assistance à la sécurité dirigée par l’Otan, un bataillon appelé à combattre dans les provinces de Helmand, Kandahâr, Zâbol, Nimrouz, Ourouzgân et Day Koundi. En outre, la Grande-Bretagne enverra un avion de transport C-130, quatre chasseurs-bombardiers Harrier et autant d’hélicoptères de transport de troupes Sea King.
Le Danemark pourrait également suivre la voie tracée par la Grande-Bretagne. Après avoir annoncé mercredi le retrait de son bataillon de 430 hommes déployés dans le sud de l'Irak, Copenhague pourrait envoyer 200 soldats supplémentaires en Afghanistan, portant ainsi sa participation à 600 hommes.
Par ailleurs, l’Australie pourrait doubler le nombre de ses soldats déployés en Afghanistan, ce qui le porterait à 1 000. Jeudi, le ministre de la Défense, Brendan Nelson, a annoncé l’envoi d’une mission en Afghanistan afin d’étudier la faisabilité d’un tel déploiement. L’Australie ne souhaitait pas augmenter ses efforts en Afghanistan. Toutefois, des discussions avec les autorités américaines, britanniques et néerlandaises (les soldats australiens sont majoritairement déployés dans la province d’Ourouzgân où ils opèrent avec l’armée néerlandaise) ont récemment modifié la donne.
À ces renforts s’ajoutent les 3 200 soldats que les États-Unis ont décidé de déployer pour renforcer leur dispositif afin de tenter de faire échec à une offensive des taliban qui est attendue pour les prochaines semaines. Notons également la décision de la Slovaquie d’accepter le redéploiement de ses soldats à Kandahâr, dans le sud de l’Afghanistan, à condition qu’ils soient uniquement employés à la défense de l’aéroport de l’ancien bastion des taliban. La Force internationale d’assistance à la sécurité compte 35 000 hommes de 37 pays sur le territoire afghan.
Face à eux, les taliban affirment être en mesure d’aligner 6 000 combattants, dont 400 candidats au martyre. Environ 140 attentats-suicides ont été perpétrés l’année dernière en Afghanistan. Selon le mollah Dadôllah, en charge des opérations militaires dans le sud de l’Afghanistan, 4 000 combattants pourraient renforcer les taliban le cas échant. « Cette année sera la plus sanglante pour les troupes étrangères. Ce n’est pas seulement une menace, nous allons le prouver », a-t-il affirmé dans un entretien accordé à Reuters. « Les préparatifs des taliban se poursuivent dans les caves et les montagnes. Nos 6 000 combattants sont prêts à attaquer les troupes étrangères dès que le climat changera et se réchauffera », a-t-il poursuivi. Il a également précisé que la rébellion dispose désormais d’armes capables d’abattre des hélicoptères.
Offensive diplomatique coordonnée de l’axe Washington-Londres
Le vice-président américain Dick Cheney s’est rendu lundi Pakistan pour une visite présentée comme inopinée. Il a rencontré le président pakistanais, Pervez Moucharraf, pour discuter « de l'Afghanistan et des relations bilatérales », pendant près de deux heures, selon une source pakistanaise.
M. Cheney a fait part aux responsables pakistanais de ses « appréhensions » face au regroupement de militants présumés d'al-Qaïda dans des zones tribales à la frontière entre le Pakistan et l'Afghanistan, selon un communiqué publié par la partie pakistanaise. M. Cheney a également fait part des « graves inquiétudes des États-Unis » suite à des informations du renseignement américain sur une offensive imminente au printemps de militants taliban contre les forces armées occidentales en Afghanistan, a ajouté le communiqué. Puis, le vice-président américain s’est rendu à Kaboul où il a rencontré le président afghan, Hamid Karzaï.
Selon le New York Times, le discours tenu par M. Cheney au général Moucharraf est moins « diplomatiquement correct ». En effet, le président George Bush a, selon le quotidien américain, décidé d'adresser à Moucharraf un message au ton très ferme pour l'avertir que le Congrès, désormais dominé par les démocrates, pourrait suspendre l'aide de Washington faute de résultats dans la traque des agents d'al Qaïda. « Il a donné un certain nombre de garanties au cours des derniers mois, mais, globalement, ce qu'ils font ne marche pas. Le message que nous lui adressons maintenant, c'est que seul le résultat compte », a déclaré un membre de l'administration Bush cité par le journal.
Dick Cheney a été précédé à Islamabad par la ministre britannique des Affaires étrangères, Margaret Beckett. Dimanche, elle s'est aussi entretenue avec le général Moucharraf sur la présence d'insurgés taliban dans les régions frontalières de l'Afghanistan. Elle a également rencontré son homologue, Khurshid Kasuri et le Premier ministre Shaukat Aziz.
Lundi, au cours d’une conférence de presse, Mme Beckett a appelé le Pakistan a participé plus activement à la lutte contre la menace d'insurgés d'Al-Qaïda et taliban. « Al-Qaïda et des mouvements associés constituent une menace commune contre la société. Pour en triompher, il faut une coordination et une coopération entre nos deux pays », a-t-elle dit, tout en saluant la « coopération du Pakistan » et son « engagement continu à lutter contre le terrorisme ».