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 « La religion est l'opium du peuple »

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Yama
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Yama


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« La religion est l'opium du peuple » Empty
MessageSujet: « La religion est l'opium du peuple »   « La religion est l'opium du peuple » Icon_minitimeSam 5 Sep - 10:42

Des phrases illustres, celle-ci est sans doute l'une des plus stupides, l'une des plus contraires à la réalité et ce qu'elle indique, c'est seulement l'ignorance totale de son auteur – dont la doctrine a dû faire plus de cent millions de morts... – quant à la religion et celle de ceux qui aiment à la citer. Un aboiement d'un vulgaire profane, en fin du compte, qui cherche à mordre le sacré.

Cela dit, elle pourrait aussi décrire avec justesse et concision ce qu'est la religion si on la lit autrement. En effet, s'il est question d'opium, c'est qu'il y a des souffrances dans l'air, du mal-être, de l'insatisfaction, du désordre à un niveau ou à un autre. Cet état est essentiellement la situation de l'homme dans le monde ; si l'homme vient en ce monde, c'est qu'il y a du désordre à corriger, des souffrances à transmuter, des ténèbres à illuminer par la prise de conscience et la rectification ou le polissage intérieur. Il y a donc du bordel, et l'homme vient pour arranger sa part ; celui qui n'a aucune souffrance, qui n'a aucun ennui, nul chagrin dans sa vie est soit un Saint – qui voit la création dans sa divine perfection – soit un inconscient qui, satisfait de son propre sort, ignore ou n'a cure des souffrances des autres ; comme disait Saadi, si tu t'en fous des malheurs des autres, « il ne sied pas que l'on t'appelle homme ».

Pour arranger ce chaos, pour éclairer sa part de ténèbres, pour apaiser sa part de souffrances, l'homme a besoin de moyens et il se trouve que l'opium est un excellent moyen pour obtenir les effets souhaités. L'opium est un antalgique puissant, il a des effets relaxants pour le moins, des vertus anxiolytiques, pacifères et, si l'on en prend régulièrement, il peut provoquer des hallucinations. Autrement dit, il apaise le corps, l'âme et ouvre la conscience à certaines dimensions supra-sensorielles. N'est-ce pas la fonction précise de la religion ?

Les rites religieux ont très précisément pour fonction d'injecter de l'intérieur des influences divines qui sont curatives, pacifères et éclairantes. Comme les voiles de l'âme sont épaisses et que la tête est trop souvent occupée par les affaires du monde, ces effets ne sont pas toujours et immédiatement perceptibles, mais il y a effet dans tous les cas et personne n'a jamais prié, avec attention et sincérité, sans sentir au moins une certaine détente, un certain apaisement, un certain bien-être qui enveloppe le corps et la tête. Durant ces moments, et plus largement à chaque fois que l'homme se souvient de Dieu, celui-ci « émerge » en lui et fait ce qu'il faut faire : pacification ou guérison ou encore illumination progressives ; la guérison est progressive, insensible peut-être, muette (je repense à l'instant à ce proverbe : « Le temps une lime qui travaille sans bruit »...), parce qu'une guérison soudaine, une rectification totale et brutale anéantirait l'homme. Donc l'opium fait son œuvre, il suffit d'en prendre régulièrement et comme il faut.

Il faut rappeler que l'opium désigne bien « le suc du pavot » ; il y a donc le pavot, la plante, manifeste, accessible à tous et il y a le suc, le « produit nourricier » qu'il faut aller chercher... L'on a là les dimensions extérieure et intérieure de la religion. La pavot a assurément des vertus, mais son « suc » est bien plus profitable et c'est lui qui ouvre la conscience à des dimensions supérieures.

L'opium produit sans doute des effets agréables, mais l'opium religion propulse l'homme dans des sphères dont les joies, les délices, les jouissances sont inconcevables pour celui qui ne s'en est pas encore enivré ; il ne s'agit plus ici des « paradis artificiels », mais des paradis réels ou des étapes de « proximité » de Sa Présence.

Donc oui, sans aucun doute, la religion est en ce sens l'opium du peuple et les effets qu'elle produit en l'homme dépassent ce que le mental peut appréhender. Elle n'endort pas, elle réveille, elle ne soumet pas, elle redresse, elle n'abîme pas, elle illumine et quoique son goût soit en apparence parfois amer, elle est le plus puissant instrument pacifère.

Consommons donc les amis, je vous sers de l'afghan !
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