mercredi 16 février 2005, 17h20
Une explosion agite le spectre d'une attaque contre le nucléaire iranien
TEHERAN (AFP) - Une forte explosion suivie de vagues témoignages relayés par une télévision ont agité mercredi le spectre d'une attaque étrangère contre les installations nucléaires du sud de l'Iran, avant qu'un haut responsable déclare que la détonation était due à des travaux de voirie.
"Cette explosion a été provoquée volontairement vers 10h30 pour ouvrir une route dans la roche vers le barrage de Kossar", a indiqué à l'AFP un porte-parole du Conseil suprême de la sécurité nationale, Agha Mohammadi.
"Il ne s'agit en aucun cas d'une attaque contre les installations nucléaires de la République islamique", a-t-il ajouté, comme pouvaient le suggérer des informations de la chaîne publique de télévision satellitaire iranienne en arabe Al-Alam.
Cette dernière a rapporté une violente déflagration survenue selon elle à 10h10 (06h40 GMT) dans une zone inhabitée près du port de Daylam, sur le Golfe, dans la province de Bouchehr, celle-là même où se construit la première centrale nucléaire iranienne.
Al-Alam a aussi fait état de témoignages, sans plus de précision, selon lesquels l'explosion était due au tir d'un missile par un appareil non-identifié.
"La déflagration est sûrement due à des travaux de voirie en vue de la construction d'un barrage dans cette région montagneuse", est convenu sur la télévision publique le vice-ministre de l'Intérieur, Ali Asgar Ahmadi.
Mais la seule association des mots Bouchehr et missile avait déjà provoqué un vif émoi, bien que la centrale se trouve à environ 150 km au sud-est et qu'elle ne fournirait pas nécessairement la cible la plus stratégique à une action militaire contre le nucléaire iranien.
Les installations nucléaires de la République islamique sont en effet régulièrement désignées comme les cibles possibles de frappes de la part des Etats-Unis ou d'Israël.
Ces derniers accusent la République islamique de chercher à se doter de la bombe atomique sous le couvert d'un programme civil, et le président américain George W. Bush lui-même n'a pas exclu l'hypothèse d'opérations militaires pour empêcher l'Iran de posséder l'arme nucléaire.
Mais, à Jérusalem, un haut responsable interrogé par l'AFP a estimé sous le couvert de l'anonymat que "l'incident dont nous avons entendu parler dans les médias ne vaut même pas la peine d'être commenté". Cela ressemble plus à un ennui technique d'un avion iranien qu'autre chose, a-t-il dit.
Une source locale a dit à Al-Alam que l'explosion pourrait avoir été provoquée par la perte d'un réservoir de kérosène par un avion iranien.
L'éventualité d'une attaque étrangère, semblable à celle menée par Israël contre le réacteur irakien d'Osirak en 1981, occupe les esprits en Iran, même si l'affaire paraîtrait bien plus compliquée et si les Etats-Unis disent vouloir explorer toutes les voies diplomatiques.
L'Iran aura "dans les six mois" les connaissances nécessaires pour fabriquer une bombe atomique, a affirmé mercredi à Londres le ministre des Affaires étrangères israélien Sylvan Shalom.
Mohamed Elbaradei, le directeur de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) qui surveille les activités nucléaires iraniennes, a au contraire redit dans le Washington Post qu'il n'existait pas de preuve que l'Iran mettait au point l'arme nucléaire.
Le même Washington Post écrivait dimanche que les Etats-Unis avaient fait voler des avions de reconnaissance sans pilote depuis avril 2004 au-dessus de l'Iran, à partir de bases américaines en Irak, à la recherche d'éléments prouvant l'existence d'un programme d'armement nucléaire iranien clandestin.
Le ministre des Renseignements iranien Ali Younessi a confirmé la présence au-dessus de l'Iran d'engins d'espionnage américains, parlant cependant de satellites et non de drones.
"Nous avons les moyens de les combattre (ces engins) et s'ils se rapprochent notre défense antiaérienne les prendra en charge", a-t-il dit.
Selon lui, "il y a longtemps que les Américains mènent des activités d'espionnage dans le ciel iranien".