La ministre suisse des Affaires étrangères Micheline Calmy-Rey a brisé lundi un tabou: elle est la première responsable de la diplomatie d’un pays démocratique à envisager un dialogue direct avec Oussama Ben Laden.
Faut-il «rechercher le dialogue sans discrimination - quitte à s’asseoir à la table d’Oussama Ben Laden?», s’est interrogée Mme Calmy-Rey devant ses ambassadeurs réunis à Berne pour leur conférence annuelle.
Pour elle, le «refus du dialogue est en fin de compte toujours stérile». Il doit s’instaurer, y compris avec «les infréquentables».
La Suisse ne dispose pas, comme d’autre pays, de liste d’organisations interdites. L’appartenance à une organisation considérée comme terroriste, y compris par l’ONU, n’y est pas pénalement répréhensible, seules les activités criminelles de membres de ces organisations peuvent être poursuivies.
«Certes, des organisations comme le Hezbollah, le Hamas, (la guérilla colombienne des) FARC, les (séparatistes tamouls du) LTTE ou (les rebelles ougandais de) la LRA recourent à des méthodes terroristes que nous condamnons. Reste que ce sont des acteurs politiques de poids, incontournables dans la recherche d’un règlement de conflit», a fait valoir la ministre.
Insistant sur le fait que «comprendre ne veut pas dire excuser et ne signifie pas complicité», elle n’a cependant pas caché les risques que prendrait la diplomatie suisse: «Gardons bien conscience que nous nous aventurons souvent en terre inconnue.»
La diplomatie suisse s’est déjà attiré de vives critiques des Etats-Unis, d’Israël, et même de la chancelière allemande Angela Merkel, pour ses relations avec l’Iran, accusé de financer le terrorisme et de vouloir se doter de l’arme nucléaire. A ce propos, les commentaires sur la visite de Mme Calmy-Rey en mars dernier à Téhéran, ont été particulièrement sévères.
Non contente de superviser la signature d’un contrat entre deux sociétés suisse et iranienne, la ministre, la tête voilée, avait été photographiée tout sourire aux côtés du président Mahmoud Ahmadinejad et sous un portrait monumental de l’ayatollah Khomeiny.