Pakistan

Tensions croissantes entre le Pakistan et les Etats-Unis

LE MONDE | 16.09.08 | 11h32 • Mis à jour le 16.09.08 | 11h32



L'incertitude régnait encore, mardi 16 septembre sur les conditions dans lesquelles des soldats pakistanais auraient effectué, lundi, des tirs de sommation contre des soldats américains s'apprêtant à pénétrer en territoire pakistanais.
Selon la BBC, Reuters et l'Agence France-Presse, des hélicoptères auraient atterri sur le côté afghan de la frontière avant que des troupes au sol ne tentent de la traverser en direction de la ville d'Angoor Adda, au Sud-Waziristan, puis rebroussent chemin après les tirs. Washington et Islamabad ont démenti. Mardi, le commandement américain à Kaboul a affirmé au "Monde" que "si une nouvelle tentative d'incursion a existé, elle relève du mandat confié aux troupes de l'opération Liberté immuable contre le terrorisme et non de l'OTAN".

La tension entre les Etats-Unis et le Pakistan n'a jamais été aussi grande depuis l'incursion terrestre, le 3 septembre, de soldats américains dans le Sud-Waziristan contre un repère du clan de Baitullah Mehsud, chef taliban des zones tribales. Intrusion justifiée par le chef d'état-major américain, l'amiral Michael Mullen pour qui les zones tribales sont le sanctuaire des talibans et d'Al-Qaida. Le chef de l'armée pakistanaise, le général Ashfaq Kayani, avait réagi en assurant qu'"aucune force étrangère ne sera autorisée à conduire des opérations à l'intérieur du Pakistan".
De fait, l'armée américaine a déjà étendu la guerre au Pakistan. Selon un adjoint du général Jeffrey Schloesser, plus haut gradé américain en Afghanistan, les opérations se sont multipliées depuis début juillet et ont visé en priorité les agences tribales de Bajaur, du Nord-Warizistan et du Sud-Waziristan où se trouveraient l'essentiel des groupes d'insurgés.
Quatorze attaques transfrontières ont été reconnues par l'armée américaine en 2008 contre 10 en 2006 et 2007. Depuis le 31 août, parmi les quatre raids aériens et l'attaque au sol, admis par les Américains, quatre missions ont visé le seul réseau du chef taliban Jalaluddin Haqqani, ex-héros de la guerre contre les Soviétiques et figure pashtoune rivalisant avec le mollah Omar, chef des talibans.

LE RÉSEAU HAQQANI

Selon les représentants de l'OTAN à Kaboul, le réseau Haqqani est le plus grand danger pour l'Afghanistan car "c'est un pont entre les zones tribales pakistanaises et l'Afghanistan et entre les talibans et Al-Qaida". L'un de ses fils, Sirajuddin, dont la tête est mise à prix à 200000 dollars, a revendiqué les principales attaques en Afghanistan depuis un an. Ses frères, Naisruddin, né d'une mère arabe, et Sayyed Mohammed, ex-ambassadeur au Pakistan sous le régime taliban, font le lien avec les Arabes d'Al-Qaida et les talibans du mollah Omar.
Le 8 septembre, un drone américain a bombardé la madrasa familiale de Manba Ulom aux grandes portes bleues, dans le village de Dande Darpa khel, près de Miranshah, siège administratif du Nord-Waziristan. Centre de formation du réseau Haqqani depuis les années 1980, cette école religieuse servait aussi de lieu de réunion pour des cadres d'Al-Qaida. Elle avait été fermée, en 2002, par le autorités pakistanaises puis rouverte en 2004.
Ni Jalaluddin Haqqani ni ses fils ne s'y trouvaient lors de la frappe. Une quinzaine de parents, dont deux femmes de Jalaluddin ont été tués. Les services de renseignement américains estiment que deux Saoudiens et un Egyptien d'Al-Qaida y seraient morts. L'autre fief des Haqqani se trouve de l'autre côté de la frontière, dans leur village natal de Zambar (province afghane de Khost), considéré comme l'un des carrefours de l'insurrection. Les forces américaines l'ont investi, le 13 septembre, mais n'y ont pas trouvé trace de leurs "pires ennemis".

La jeunesse dorée pakistanaise