Yama Membre Extra
Nombre de messages : 548 Age : 41 Localisation : Kharâbât Date d'inscription : 09/10/2012
| Sujet: Dialogue oiseux Lun 14 Mai - 14:57 | |
| - L'on m'a dit que tu étais un bon confident et je viens te voir pour... - M'entretenir des tes problèmes ? - Oui et... - Espérer des remèdes ? - Oui... Je peux ? - Tu peux te confier oui, je suis vaste comme ton cœur, muet, sourd et aveugle comme toi. Tu peux te confier donc, mais n'espère rien de ma part. - Pardon ? Pourquoi ces traits offensants ? Je ne... - Traits ou portrait ? - D'accord, je vois... - Non, puisque nous sommes aveugles. - Assez, je regrette d'être venu. Je pensais que... - Je pensais que tu m'aurais compris. - Compris ? Compris quoi ? Que te gausses de moi et te livres au délire ? - Tu viens dans l'intention de passer un moment avec moi mais tu es absent de toi-même. Tu es tout entier absorbé par les ennuis dont tu voudrais me faire part et penses à mille autres choses certainement à l'instant... Comment voudrais-tu, dans cet état, "être avec moi", ou "être avec toi" ? - Je... - Mon portrait, quoiqu'il soit fidèle à une certaine réalité, avait surtout pour but de te donner un coup et te défaire de la poussière du chemin, je veux dire de tes préoccupations, afin que tu sois réceptif à ce que l'instant que nous partageons ici et maintenant pourrait nous offrir. - D'accord... Tu veux dire que je n'étais pas dans, pour ainsi dire, dans un état convenable ? - Certainement pas; mais je te sens déjà plus présent, et c'est bon signe ! - J'avoue que je me sens un peu mieux ; mais que devrais-je faire pour pour être toujours dans le "bon état" ? - C'est simple : essayer d'être entièrement, pleinement, absolument "là" où que tu sois, seul ou accompagné. Être là, simplement, et indépendamment du contexte, des propos, des actions. - Mais...on est toujours là, non ? - Non, malheureusement ; notre corps est certes là toujours, mais nous avons l'esprit ailleurs... Nous pensons à mille choses, nous nous consacrons à mille choses et êtres absents au lieu de prêter une attention entière à l'instant que nous vivons et à la personne avec qui nous nous trouvons. - J'avoue que ce que tu dis n'est pas faux... Mais alors, si on est là sans être pleinement là, on se fout d'une certaine manière de la gueule du monde ? - Très bien dit ! Mais les choses sont plus graves encore : cet état peut se traduire par "se foutre de la gueule de l'univers", pas seulement des gens en compagnie desquels nous nous trouvons, mais aussi et surtout se moquer de l'Instant Présent; or cet Instant est tout ce qui est, et si nous savions ce qu'il y a "derrière" cet Instant, nous accepterions de mourir plutôt que nous en moquer. - Ah bon ? Qu'y a-t-il... ? - Cela étant, ce que l'on dit ou fait importe peu au fond, l'important est d'être là toujours, d'être hautement attentif à l'Instant et, par conséquent, d'être entièrement présent pour ceux qui nous accompagnent en Cet Instant précisément. - Tu ne m'as pas répondu, qu'y a-t-il dans l'Instant ? - Pour ce qui est du portrait... - Réponds-moi s'il te plaît ! - Nous sommes grands, vastes, immenses, d'une immensité incommensurable; mais nous l'ignorons. - Parce que nous sommes aveugles ? - Nous voyons, écoutons et parlons ordinairement par le truchement de notre compagnon nommé tantôt Démon, tantôt Ego, tantôt Mental; par conséquent, nos perceptions et nos expressions sont coupées de notre réalité par la barrière mentale et rien n'entre réellement en nous et rien ne sort réellement de nous. Nous sommes donc, peut-être pas toujours, mais souvent certainement, sourds, aveugles et muets. - Je comprends mieux... Mais que faire pour ôter cet obstacle ? - Commencer par être toujours présent peut-être. - Et puis ? - Nous verrons bien. - D'accord... je vais essayer. Mais réponds-moi s'il te plaît : Qu'y a-t-il derrière l'Instant présent ? Tu l'as évoqué tout à l'heure mais as refusé de m'expliquer. - Je ne le puis, puisque je suis muet ! - "MDR" ! Réponds-moi... - A propos, que voulais-tu me confier ? - Puisque c'est comme cela, je suis muet aussi ! - Quoi de mieux alors ? Allons prendre un café en silence. - Cela me convient, on y va ! | |
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